Quai des Rolex, Quai des iPhones : mi pub, mi… Mainmise !

Quai des Rolex
Qu’ils sont ravis nos touristes… Non pas parce qu’ils viennent d’apercevoir la Tour Eiffel — cette dernière est déjà éteinte ! Tout comme Notre Dame, le Panthéon ou l’hôtel de ville de Paris… Imaginez à quel point ces derniers sont comblés de pouvoir ramener dans leur contrée une aussi belle carte postale !

Ils auront beau avoir arpenté la capitale, de jour comme de nuit, à la recherche du Midnight in Paris de Woody Allen, ils devront se résigner à ce triste constat : le beau Paris by night est bel et bien utopie.

Un Paris qui se donne des apparences en trompe-l’œil mais qui réellement est un Paris constamment en travaux. Rues fermées ou impraticables, omniprésence d’échafaudages, des trottoirs dégoudronnés et sablonneux en friche. Le bruit des klaxons de voitures a remplacé l’air d’accordéon qui résonne à travers les rues parisiennes. À peine un chantier émerge-t-il qu’il est déjà bâché par de la publicité !

LA COUR D’APPLE DE PARIS, SITUÉE AU 34 QUAI DES IPHONES

Quai des orfevres iphoneEsthétiquement parlant, l’États-unien apprécie cette pollution visuelle qui lui rappelle vaguement les enseignes démesurées de Times Square à New-York. Aussitôt, il sort son iPhone pour prendre un cliché. Ne distinguant plus le nom de la voie, notre touriste s’empresse aussitôt de rebaptiser la rue sur Instagram : « 36, Quai des Rolex » ou « Quai des iPhones » en fonction de s’il se trouve côté Pont Saint-Michel ou Pont Neuf. Après tout, le téléphone à la Pomme et le garde-temps Suisse, accessoirement horloger de l’aéroport Charles de Gaulle, sont de remarquables gages pour une institution policière orfèvre en la matière.

Maires, députés ou ministres se garderont bien de s’en émouvoir car quand le bâtiment va, tout va ! Même le juriste véreux — amoureux du patrimoine français, certes… mais toutefois des plus procéduriers — se défendra de porter l’affaire en justice de peur d’être débouté devant la Cour d’Apple de Paris, située au 34, Quai des iPhones.

JCD&CO REVISITE L’ARCHITECTURE DE PARIS

Une belle victoire pour l’architecte JCDecaux qui réussit à briser l’harmonie des quartiers de Paris au gré des signatures de contrats publicitaires. Le résultat est époustouflant pour les touristes comme pour les habitants qui ne reconnaissent plus leur ville. Un tel génie qui incruste finement des imitations de fragments de notre patrimoine à travers ses publicités mériterait de rejoindre la célèbre maroufleuse de choc Valérie Damidot sur M6 dans un nouveau format que l’on intitulerait JC D&co.

Dans un souci de transparence et voulant à tout prix calmer les inquiétudes légitimes, les latifundistes ont gravé dans le stuc, leurs honnêtes intentions et motivations « en l’application de l’article L 621 29 8 du code du patrimoine, les recettes perçues par le propriétaire du monument pour cet affichage sont affectées au financement des travaux ». Un émouvant épitaphe attestant la véracité de leur soudain — mais non moins réel — intérêt envers le patrimoine français.

Pour parachever cet avènement et dans le plus grand des cynismes, notre maître d’œuvre dans l’art du mirage urbain Jean-Claude, JC pour les intimes, tel un artiste, y appose même sa signature lumineuse en bas à la façon d’un tableau.

Bientôt, sous prétexte de financement pour le climat, on observera de gros hologramme du logo COP21 projetés sur le ciel. Ouf ! L’on peut enfin respirer… La planète est sauvée.

Daniel Latif

Pourquoi je persiste et signe avec mon BlackBerry

Blackberry“Quand est-ce que tu décides d’avoir un vrai téléphone ?” Voici le procès que l’on me fait régulièrement. L’on m’accuse ainsi d’être has been. Tout ça parce que je suis Blackberry. J’avoue, j’en suis fier. Certes, mon BlackBerry Q10 porte le nom d’une crème Nivea. Mais cela décrit à merveille la sensation de douceur que j’éprouve lorsque mes pouces effleurent les touches du clavier. L’appellation Q10 évoque cependant très justement des performances qui seraient supérieures à n’importe quelle Audi.

BLACKBERRY MÛRIT ET APPREND DE SES ERREURS

Exit le Bold, Curve, Javelin, Pearl ou encore Torch… ‎Les nouveaux BlackBerry rompent avec la tradition des noms exotiques‎. En janvier 2013, c’est le début de la commercialisation du Z10. Le Canadien a voulu empiéter sur l’esprit de l’iPhone, délaissant ainsi le clavier physique au profit d’un écran tactile, et ce fut bien là son erreur. Ce ne sera que sous l’impulsion de son nouveau PDG John S. Chen que la firme à la mûre mûrit en présentant le Passport, un drôle de téléphone aux dimensions similaires au document de voyage. BlackBerry PassportUne émulation plutôt réussie qui propose aux globe trotters une sorte d’hybride tablette offrant une lecture ergonomique et confortable, grâce notamment au clavier touch-sensitive : une innovation sur un clavier physique capable de faire défiler de façon tactile une page sans avoir à toucher l’écran avec ses doigts.
Mais BlackBerry a compris ses aficionados, après avoir démocratisé BBM en novembre 2013 pour iPhone et Android — séduisant aujourd’hui plus de 90 millions d’utilisateurs, elle décide de la mise sur le marché du BlackBerry Classic, un smartphone qui revient aux sources. Au bonheur des nostalgiques du Bold désireux de retrouver les sensations du bon vieux clavier et du pavé tactile remis au goût du jour avec le système BlackBerry 10.

SMART COMME OBAMA ET SEXY COMME KIM KARDASHIAN

Malgré les innombrables fausses rumeurs concernant la vente ou la santé de la société canadienne et en dépit de la forte pression sociale, des Apple addicts prêchant et tentant inlassablement de convaincre les derniers hérétiques de se convertir à la secte de la pomme, les irréductibles du BlackBerry subsistent. Les “BlackBerrystes” sont comme un cercle élitiste tendant à vouloir plus ou moins consciemment à se différencier de la masse. Parmi eux, des personnalités comme Barack Obama, qui le revendiquent ou encore Kim Kardashian, entre autres, qui confesse en avoir acheté trois exemplaires du Bold en supplément, de peur que l’un d’entre eux ne tombe en panne, car elle reconnaît être liée à la marque “cœur et âme”. BlackBerry Bold Passport Q10Qu’elle se rassure, les BlackBerry sont réputés pour leur robustesse notoire, très loin de l’image des iPhones, bien connus pour être fragiles, dont la vitre se fissure sans peine.
Car le groupe canadien n’ambitionne pas de jouer dans la cour du marché des terminaux de masse et préfère concentrer sa stratégie sur une clientèle d’entreprise. En effet, si l’iPhone enregistre des volumes de ventes proportionnels à ceux de la Renault Clio, la voiture la plus vendue en 2014, le BlackBerry, lui, serait classé au rang d’une Lamborghini Gallardo.
Les quolibets sur BlackBerry et ses utilisateurs sont légion sur Twitter. Mais rira bien qui rira le dernier, car avec un retour à l’équilibre et enregistrant un bénéfice de 20 millions de dollars, BlackBerry… encore !

Et c’est pour cela que je persiste et signe avec mon BlackBerry.

Daniel Latif