Le nouveau L’Équipe : mi pub, mi… Enlise !

NouveauLequipeLa photo est contractuelle. En voilà un beau coup de communication ! Une fabulation tellement bien orchestrée par l’agence de publicité DDB Paris qu’elle relève d’une organisation des plus méthodiques. Beaucoup mieux qu’une opération réglée comme du papier à musique, la campagne #nouveauLEQUIPE est calibrée sur du papier millimétré.

En effet, comment faire passer incognito auprès d’un fanatique que son support préféré va se réduire comme peau de chagrin sans risquer l’hooliganisme ?

Tout simplement, en lui contant une belle histoire à dormir debout. L’histoire d’un record, un pur artefact : « le plus grand quotidien sportif français » qui « mesure officiellement « 28 x 36 cm » depuis le 18 septembre 2015.

« CHÉRI, J’AI RÉTRÉCI L’ÉQUIPE ! »

Ancien lequipe nouveau« Super », « Bravo », « Cool », « Fan », « Top »… Les lecteurs du quotidien sportif L’Équipe ne tarissent point d’éloges — sur Twitter — au sujet du rétrécissement de leur journal. Fini le « broadsheet », nos athlètes de la lecture dans les transports en commun se réjouiront de l’aspect « plus pratique » du « tabloïd » qui dorénavant leur permettra de le lire sans éborgner leur voisin. Le fanatique sportif serait-il soudainement devenu courtois et civil au point de se soucier du confort des autres passagers ?

Il subsiste, cependant, quelques courageux attachés au charme du format historique de l’Équipe. Ces derniers regrettent le ratatinement de la mise en page et le fait de ne plus pouvoir plier leur journal en quatre.

Ironie du sort. Entre les réductions des coûts de fabrication et distribution, la disparition de nombreux titres et l’effondrement des ventes depuis quelques années… Ce faire-part annonçant la renaissance du célèbre journal sportif français représente une allégorie de la décadence de la presse écrite aujourd’hui. L’absence de graphe confirme bien l’hécatombe dans la presse quotidienne où seules quelques grandes éditions persistent encore dans les kiosques pour le symbole et le prestige.

Daniel Latif

Neymar : mi pub, mi… Sponsorise !

Non, non… vous ne trouverez point Neymar dans une discothèque, ou à bord de sa dernière Ferrari. Fait rarissime pour le jeune footballeur, à défaut de laver son linge en public, il se trouve dans la buanderie.

Neymar pub panasonicTrônant céans sur une «machine à laver intelligente» plus blanc que le mur blanc et aussi foisonnante que son trait d’esprit, il incarne la nouvelle posture royale brésilienne déguisé d’un célèbre bleu de travail.

Non content de vous poser la machine à laver, il posera fièrement sur cette dernière et y apposera même en toute humilité son autographe, sorte de cachet personnel garantissant les « performances de champion » de sa lessiveuse.

Assis seul, dans une chambre dont l’atmosphère est aussi froide que le design scandinave épuré, le champion de foot fait figure de premier de la classe. Aurait-il poussé le zèle jusqu’à laver son ballon qu’il semble protéger jalousement ? Tellement bon élève et roi dans les apparences qu’il en a même masqué ses tatouages.

A 23 ans et avec un salaire dépassant les 10 millions d’euros par an, la ménagère est convaincue que son idole a très peu de chance de porter plus d’une fois le même vêtement. Car notre coach consommateur n’est pas dupe et reconnaît, derrière cette allégorie du télé-achat, la volonté de Neymar d’être blanchi.

Daniel Latif

Vanité automobile

Audi RS3Un bolide noir vrombit dans Paris. Les passants se figent… Les conversations des clients en terrasse en sont perturbées. Difficile d’ignorer cette ultra sportive qui arrive avec fracas.

Derrière le « cerceau » : Mathias, pilote de course aguerri. En copilote : moi ! Pas très rassuré, accroché à la poignée de son RS3. « Non, pas par la droite ! » lancé-je au coureur qui se lamente régulièrement que « c’est le salon de la tortue ».

Pas de climatisation, « ça réduit les performances ». Cependant, le son de la radio est à fond. « Hit music only » laisse place à la publicité. Je m’empresse aussitôt de baisser le volume pour atténuer l’effet « kéké ». J’ouvre la fenêtre : « Ah bah bravo !!! » nous sermonne une mamie que le pilote laisse traverser.

« C’EST LE SALON DE LA TORTUE ! »

L’échappement se laisse aller à la râlerie et aux éclats à travers ces petites ruelles.
Des vocalises que notre compétiteur effectue tel un virtuose. Le visage de Mathias s’illumine, c’est son moment de gloire. Du moins, c’est ce qu’il croit. Je persiste dans une tonalité des plus moralistes, tel un moniteur d’auto-école : « C’est limité à 30 ! ».

Une frénésie aliénante, de la vanité automobile à son plus haut mépris. Rendant le paysage inintelligible et le voyage angoissant. De la frime… Me direz-vous ? Inexistante, en effet personne n’a eu le temps de réaliser ce qu’il vient de se passer. Des piétons frustrés, car persuadés de tomber nez à nez avec une Lamborghini. Que nenni, ce n’est qu’une Audi !

Daniel Latif

La crêpe au Grand Marnier : nouveau symbole de Saint-Tropez ?

St TropezIl règne comme un parfum de gourmandise au détour des remparts, dans le cœur du vieux Saint-Tropez, loin des yachts vaniteux. C’est en flânant à travers ces petites ruelles atypiques que l’on est attiré, non pas par le chant des sirènes mais par l’odeur enivrante en provenance de l’enseigne Grand Marnier.

Grand Marnier Saint TropezCela fait plus de 35 ans que Roger, responsable de la boutique, réveille les papilles des nombreux touristes et célébrités qui viennent déguster d’authentiques crêpes faites maison. Tous les sens sont en ébullition et l’on s’enchante au son du crépitement du beurre sur les plaques. Le geste assuré, Roger la saupoudre de sucre et y verse subtilement du Grand Marnier puis la plie aussitôt en triangle.

Crepe Grand MarnierLes plus gourmands pourront rajouter à convenance de la fameuse liqueur d’orange avec l’immense bouteille qui trône sur le comptoir. Pour varier les plaisirs, les épicuriens peuvent déguster des crêpes au sucre, ou avec un large choix de confitures, au chocolat blanc ou noir, mais pas n’importe lesquels puisqu’il s’agit de fabrication maison à partir de grands crus Barry.

Roger connaît presque tout le monde et salue chaleureusement les passants et habitués. Au-delà d’une classique tarte Tropézienne, la ville de Saint-Tropez regorge de nombreuses autres merveilles… et qui sait ? Vous pourrez très certainement avoir l’occasion d’en déguster une aux côtés de célébrités.

Crêperie Grand Marnier
Rue des Remparts, 83990 Saint-Tropez

Daniel Latif

Cuisinella : mi pub, mi… Vicelardise !

CuisinellaAu menu du jour, le Chef vous propose : asperge assaisonnée aux petits oignons. Faîtes-la mariner, cuisinez-la ! Ce soir, c’est Monsieur qui cuisine. Cuisine Ella, pour être plus précis.

La faisant mitonner, le beautiful Frenchy a la banane car ce dernier nous a mijoté une dinde qu’il s’apprête à farcir avec débauche et décadence : Madame est servie ! Allongée telle une écrevisse, notre maître queux lui passe de l’huile… Non pas solaire mais d’olive. De quoi la laisser baba. N’y allant pas avec le dos de la cuillère, il a l’air d’avoir un bon coup de fourchette. En témoigne son sourire diabolique qui traduit bien son envie de la manger toute crue. À défaut de beurrer le moule et avant de tremper son biscuit, notre cuistot exécute avec délicatesse les prémices d’une orgie Rabelaisienne. Cette fois-ci, les carottes sont cuites, Ella va passer à la casserole.

Enfin « des cuisines qui donnent envie » ! En effet, à l’heure du tout industriel et du fast-food, voilà une cuisine où nos amoureux apprécieront les plaisirs de la chair au détriment d’y faire bonne chère.

Daniel Latif

Mercedes Classe B : mi pub, mi… Précise

La scène se passe à Stuttgart en 2461. Les femmes ont pris le pouvoir… C’est la nuit, il n’y a pas un chat et notre directrice de banque privée, arrêtée à un feu rouge, trouve le moyen de se replonger dans une torpeur… Il est vrai qu’être confortablement installé à bord d’une Classe B, accompagné d’un honnête homme dont l’allure ferait penser à Daniel Craig, en moins abruti et plus raffiné, a de quoi laisser à désirer…

Mercedes Benz B ClassPourtant, une fois n’est pas coutume, c’est Madame qui conduit et Monsieur sur le siège passager. Notre femme moderne est patronne et n’a plus l’esprit tranquille pour avoir une vie après le boulot. En effet, après tant de brigues pour en arriver à de hautes fonctions dans un univers impitoyable d’hommes, elle en aurait probablement perdu toute son humanité.

L’AMBITION CARRIÉRISTE AVANT LA VIE DE FAMILLE

Mercedes Class B pub merÀ la question : « t’as pas envie d’un enfant ? ». Elle en reste scotchée. Des réminiscences de son quotidien avec son bel ami, qui a gardé sa fougue et son âme d’enfant, refont surface.
Tellement scotchée, qu’elle ne ressortira plus de sa voiture. Lorsque Monsieur est à la plage, cette dernière ne prend plus la peine d’apprécier une vue sur le littoral et préfère rester à l’ombre, dos à la mer, prête à repartir.

Class B Mercedes pub« J’en ai déjà un, je crois », cette réponse pourrait paraître des plus sarcastiques, elle n’en est pas moins ambivalente. Le contemporain penserait immédiatement qu’il s’agit d’une excellente répartie, alors que dans les faits, cela signifie tout simplement que notre dame sort d’un divorce et qu’elle a « déjà » un enfant, puis ne souhaite pas renouveler l’expérience.

Si Mercedes-Benz arbore un certain slogan pour la Classe B : « la vie est un jeu », notre conductrice, elle, est loin de s’amuser…

Daniel Latif

Coca-Cola Zero : mi pub, mi… Méprise

Publicite Coca Cola ZeroDécidément, chez Coca-Cola Company on manque d’inspiration. Après #KissHappiness, avec la campagne de pub « j’ai embrassé » Elvis, Ray ou Marilyn… Coca a décidé de ressortir ses affiches publicitaires d’antan. Enfin, on aurait pu le croire, sauf qu’à l’époque les modèles — certes niais — posaient plus dignement.
Ne vous y méprenez pas ! Notre demoiselle à la chevelure blonde foisonnante et aux énormes lunettes rouges cœur s’apprête tout simplement à embrasser le fruit de pleine bouche — à moins qu’elle ne s’adonne aux joies de la flûte de pan, vu qu’elle n’ose pas boire en raison de la surabondance de son rouge à lèvres. Il faut vraiment avoir l’esprit mal tourné pour l’apercevoir penchée sur cette bouteille de Coca-Cola zero qu’elle agrippe tel un phallus prête à embrasser le goulot avec son bec pulpeux.

CACHEZ CETTE BOISSON QUE JE NE SAURAIS BOIRE

Ce subliminal faux selfie mal cadré plaît aux hommes, car c’est en réalité à eux que se destine le Coca zéro. En effet, ces messieurs n’assumeraient pas de boire du Coca-Cola Light, synonyme d’être à la diète et préféreront afficher qu’ils n’ont aucun complexe.
La publicité aura cependant le mérite de plaire aux amoureux de la langue française et autres linguistes qui débattront passionnément sur les essentiels des accords de la grammaire française.

En 2015, l’on ne souffle plus sur une fleur de pissenlit pour faire un vœu, on #ChoisisLeBonheur.

Daniel Latif

Quand Pikachu égaye le train-train quotidien du bus

Il règne une étrange ambiance dans ce bus 21 de la RATP. Étonnamment, les passagers sont assis dans le silence et ont le sourire. Le regard amusé, ils observent la réaction des nouveaux arrivants. Tous, sans exception, valident leur titre de transport et restent interloqués, regardant le chauffeur… Aussitôt, ils s’humanisent. Certains sont admiratifs, d’autres dubitatifs s’interrogent à la vision de cette célèbre peluche jaune : « comment il s’appelle déjà ? Ah oui, mais c’est Pikachu !!! » puis ils disent ensuite bonjour au chauffeur. Chaque nouveau passager a son petit mot : « Oh ! Il est très beau le Pikachu ! » lance un Monsieur. « Pika, Pika, chu ! » s’amuse un touriste asiatique qui en profite pour prendre un cliché, les bons souvenirs refont surface.

Pikachu RATP

« PIKACHU CHANGE TOUT, JE NE FAIS RIEN, NI PLUS NI MOINS QU’UN AUTRE COLLÈGUE »

Domi est machiniste receveur à la RATP. Il n’est pas nécessairement fan du dessin animé japonais mais il raconte que sa fille lui a donné son Pikachu pour qu’il se sente « moins seul dans le bus ». Il prit donc l’habitude de le ranger dans son sac pour aller au travail. Un jour, alors qu’un touriste lui demande le plan de la ligne, notre chauffeur sort le Pokémon jaune de son sac, car assez volumineux, puis le pose nonchalamment sur le portillon. Les commentaires et remarques bienveillantes n’ont pas tardé à suivre, Domi se rend compte que Pika capte l’attention puis appelle naturellement à la gentillesse.
« Ça change tout et je ne fais rien, ni plus ni moins qu’un autre collègue ». Depuis, la souris jaune fait tous les trajets de nuits en sa compagnie sur la ligne 38.

Conscient que l’image d’une grosse bestiole jaune peut provoquer quelques moqueries, il assume et préfère en rire lui aussi car « cela permet de briser la glace et l’image austère du chauffeur puis cela apporte de la bonne humeur ».

bus RATP BonjourAlors que les bus RATP abondent d’affiches appelant à la courtoisie, caricaturant le lot d’incivilités qui se produisent quotidiennement dans les transports en commun, qui aurait pu croire qu’une simple peluche pourrait rendre les conditions de voyage dans un bus des plus agréables ?

Vous pourrez croiser Pikachu sur les lignes 38, 28, 21 et 88.

Daniel Latif

« Oh Lord won’t you buy me a Mercedes Benz » GLE AMG

Mercedes Benz GLE AMG C63s« Ah Ma Gad, it’s an AMG ! », c’est ce qu’a laissé échapper un cycliste ‎dans les rues de Münich, les yeux rivés devant le remplaçant du ML. En effet, on a de quoi avoir le souffle coupé lorsque l’on comprend que ce Mercedes-Benz AMG GLE 63s Coupé cache sous son capot : une vraie bête féroce !

Une grille de calandre géante avec une étoile, qui s’illumine la nuit, un spoiler béant prêt à avaler les véhicules qui se seraient endormis sur la file de gauche. Une poupe musclée et charismatique qui affiche une double-sortie d’échappement intégrée de part et d’autre, des feux arrières LED qui font penser à un regard froncé de Mérou. Le tout assis sur des jantes de 22’’. Une allure terrifiante mais non moins charismatique, qui restera gravée dans les mémoires des conducteurs l’apercevant filer à 250km/h sur les Deutsche Autobahn.

Cle Mercedes Benz AMGLorsque l’on prend place à bord du Mercedes-Benz AME GLE 63s Coupé, l’on entre dans un écrin où le cuir est omniprésent et enluminé de boiseries. La clé avec le blason AMG donne le ton et il suffit de réveiller les 585 chevaux du moteur V8 biturbo AMG de 5,5 litres pour comprendre que l’échappée sera plus que belle.

Le volant à trois branches, gainé de cuir Nappa avec zones de préhensions en cuir perforé, est tellement doux qu’il glisse dans les mains et que chaque virage devient une caresse.

En terme de sonorité, les passagers seront bercés par l’excellence des enceintes Bang & Olufsen, spécialiste danois de l’audio. Mais c’est à l’extérieur que le plaisir acoustique y est le plus délectable. Ainsi, on ouvre les fenêtres pour mieux apprécier le ronronnement rauque du V8 biturbo qui transcende lors des accélérations fulgurantes, tout comme lors des décélérations où le pot laisse échapper quelques pétarades.

Un 4×4 de luxe, équipé d’une boîte de vitesses automatique AMG à 7 rapports, qui se conduit presque tout seul avec le pack d’assistance à la conduite Distronic Plus, régulateur de vitesse et de distance avec freinage automatique d’urgence en cas d’absence de réaction du conducteur. Après cette envolée, vous ne restez pas sur votre faim car le GLE contient un guide touristique et gastronomique ViaMichelin répertoriant des hôtels et restaurants à la hauteur du SUV.

Mercedes Benz GLE Off Road

Le Mercedes GLE, dans sa version classique, peut être équipé du pack off-road où l’on peut régler la hauteur du véhicule, utiliser la caméra avant lors du gravissement d’une côte et contrôler la vitesse en descente pour effectuer du franchissement pur et dur. Une option que l’on aimerait bien voir apparaître sur les versions Coupé du GLE.

Daniel Latif

La Conférence Berryer : le Palais de justice a son ‎Jamel Comedy Club

La Berryer 2015Palais de Justice, un étrange public composé de jeunes étudiants se presse pour prendre place dans la salle des Criées. Des effluves de riz au soja, sushis, sandwiches poulet mayonnaise et des frites burgers Macdo se répandent dans cette chambre au prestige éminent. Au cœur de l’ancien palais des rois de France, où certaines pièces datent même du XIIIème siècle, la scène est quelque peu affligeante. En effet, non contentes d’y pouvoir poser leur séant, certaines iront même jusqu’à reposer leur affreuses paires de tennis sur les bancs et contre les balustrades au mépris du lieu classé monument historique de France.

Au bout de trois heures d’attente, une rumeur ambiante infernale se propage, dans une chaleur étouffante, alors que certains s’agitent tels des écoliers à la cantine, d’autres arrivent étonnamment à se plonger dans une lecture religieuse de leur livre.

Ce fourmillement de profanes est venu assister à la Conférence Berryer. Un concours d’éloquence, datant de la fin du XIXème siècle, où deux « valeureux candidats » viennent répondre à une question ayant trait à personnalité invitée et sur laquelle ils ont planché deux semaines durant.

A l’issue de leur performance, ces derniers s’exposent à la critique des douze Secrétaires de la Conférence, de jeunes avocats élus après un concours jugeant de leur aptitude oratoire, le tout sous l’œil de l’invité prestigieux qui, pour clôturer cette saison 2015 est le directeur de la rédaction de l’Express : Christophe Barbier.

Arrivant la clochette à la main, l’agitant avec frénésie, Louis-Romain Riché, 4ème Secrétaire et Président de la Conférence Berryer, crie du haut de son estrade : « Peuple de Berryer !!! ». Ce maître de cérémonie svelte, aux lunettes rondes, du haut de son mètre quatre-vingt quinze, porte une très longue écharpe rouge autour de son cou — tombant jusqu’à ses genoux — à la façon de Christophe Barbier. Arrive les autres secrétaires vêtus eux aussi à l’effigie du célèbre éditorialiste d’iTélé.

L’ambiance est survoltée et rappelle ces amphis délirants d’étudiants en première année de médecine. L’invité, Christophe Barbier, arrive sous les applaudissements et les cris d’ovation, tellement pris dans l’effervescence et telle une rockstar, Barbier ira même jusqu’à escalader la table pour saluer l’audience.

Christophe Barbier Berryer

Louis-Romain Riché redonne aussitôt de la voix et calme la foule en secouant sa clochette : « Peuple de Berryer, nous t’avons entendu ». Commence alors un portrait approximatif de l’invité dressé par Cosima Ouhioun, deuxième secrétaire de la Conférence décrivant l’invité « musclé comme un sandwich SNCF », soulignant son omniprésence dans les médias : « je passe plus de temps avec vous, à travers l’écran, qu’avec mon époux qui est à cran ! » puis, s’adressant à Christophe Barbier, s’obstine à vouloir connaître la symbolique de cet accessoire rouge emblématique : « votre écharpe, cache-t-elle des pellicules ? La lavez-vous ? En avez-vous plusieurs exemplaires… ? ». Autant de question que, il faut l’avouer, tout le monde se pose secrètement.

L’EXPRESS EST-IL EN RETARD ?

Le premier candidat est présenté par Louis-Romain Riché, passant le CV du jeune avocat au peigne fin, tout en le raillant, le 4ème Secrétaire lui rappelle le sujet : « L’Express est-il en retard ? Vous répondrez à cette question par l’affirmative ! ». Voilà le premier orateur jeté conference berryerdans la fosse aux lions. Assis parmi la foule, il se lève et d’un air assuré, commence… péniblement car trop accroché à lire ses feuilles. Les secrétaires ainsi que Christophe Barbier écoutent attentivement et prennent des notes. Après avoir développé la première partie sur l’historique et la notoriété des “Unes” tabous de l’hebdomadaire, tout en filant la métaphore du train, les jeux de mots et calembours ont fusé, faisant plus ou moins rire l’audience : «L’Express aurait-il perdu son Humanité ? ». Un des secrétaires perd patience et lâche un « ta gueule ! ». Louis-Romain Riché veut mettre fin à la souffrance du premier candidat et commence à caresser la cloche comme pour annoncer la proche fin de la déclamation. Notre premier candidat conclut aussitôt et en profite pour se vendre auprès de Christophe Barbier : « je vous propose très humblement mes services à votre magazine ». Une collaboration qui sera d’autant plus facile car l’Express ne propose pas de piges actuellement.

ON N’AURA JAMAIS AUTANT RI DANS LE PALAIS DE JUSTICE

Vient le moment tant redouté du jugement dernier, le 12ème secrétaire est le premier à délibérer. Jouant lui aussi sur la métaphore ferroviaire, il compare l’intervention interminable à un « long tunnel » et conclut de façon cinglante : « tu es à l’éloquence ce que la grâce est à la ligne 13 un lundi matin à 7h25… une incompatibilité ! ».

Les secrétaires passent les uns après les autres, certains convaincants et mordants, d’autres, peu convaincus de ce qu’ils déclament, tombent parfois dans une théâtralité pour tenter de compenser leur maigre répartie. Seul face à un jury aussi nombreux, le combat est plus qu’inégal et le candidat en prend pour son grade. Les blagues des secrétaires font penser à des vannes sorties tout droit de dessins animés — avec des airs de battle de rap, allant parfois frôler le plus que douteux : « un tétraplégique ne peut pas courir, tu n’es pas l’Oscar Pistorius de l’éloquence ».

Un autre secrétaire confie une de ses craintes : ‎« qu’est-ce que se passe s’il fait un bon discours ? ». Heureusement, ce n’était pas le cas affirme-t-il soulagé.

Barbier Berryer

La parole revient enfin à Christophe Barbier : « mais quelle sauvagerie » commence-t-il presque estomaqué. Loin de cautionner cet acharnement et trouvant que la prestation du premier orateur n’était pas si catastrophique, il ajoute : « je vais défendre ce candidat ». Après une longue diatribe, il enchaîna quelques calembours dont : « nos journaux sont faits pour emballer le poisson, c’est pour ça que dans la salle des Criées je me sens chez moi ! » pour enfin conclure sur : « faut-il réviser les décisions d’acquittement ? Eh bien non, je vous acquitte ».

LE BARBIER EST-IL RASOIR ?

Pour le deuxième sujet : « Le Barbier est-il rasoir ? Vous répondrez par la négative ». Le second candidat habillé en costume, cravate et pochette se lève pour se faire présenter à l’audience. Il a une barbe fournie et taillée, et fait étrangement penser à ces avocats dans les séries télé judiciaires américaines. Le maître de cérémonie introduit ainsi un étudiant en école de commerce de l’ESSEC incapable d’envoyer son CV en entier. La plaidoirie commence et il perd aussitôt son assurance, bafouille puis revient à ses notes à de nombreuses reprises. Le public se regarde et l’on entend dans les rangs : « C’est une blague ? ». La gêne devenant tellement grande, quelques mécontents quittent la salle, beaucoup rient jaune et certains se prennent la tête dans une ambiance lourde à essayer de trouver une cohérence dans un exposé dont l’éloquence fait penser à un canular complotiste. Le summum du saugrenu sera atteint avec une comparaison entre Barbier et un vampire, affirmant que ce dernier est méconnaissable sans son écharpe. Il finira ainsi : « Ce n’est pas pour vous couvrir d’éloges, quoi qu’un stage serait de bon aloi ». C’est une hécatombe. Les secrétaires s’affairent à leurs stylos, tels des candidats dans le jeu Des chiffres et des lettres, mettant sur feuille leurs répliques. Le compte semble bon, ils délibèrent.

Salle Criees Palais justice

UN BEL ÉCHEC POUR LE CANDIDAT DE L’ESSEC

Un secrétaire commence : « Cher Richard, ou peu importe en fait… On a l’impression d’être les petits pâtés de ta farce. Tu resteras dans nos mémoires, mais pour de mauvaises raisons ». Un autre craque et ne peut s’empêcher de faire un quolibet sur son nom : « on pensait qu’on avait un champion, mais dans la catégorie Pierre Richard, on a trouvé mieux ». Notre étudiant de l’ESSEC rentre dans une torpeur, rit jaune, se frotte la barbe, gêné puis croise les bras… Soudain, alors qu’il essuie de cinglantes critiques, Richard sort un sandwich et c’est le pompon ! On n’aura jamais autant rigolé dans un Palais de Justice, dans une chambre mitoyenne à la Salle d’Audience de la Première Chambre supplémentaire du Tribunal de grande instance. Riché ira même jusqu’à lui ôter « le pain de la bouche » partageant son casse-croûte avec les secrétaires.

Enfin, c’est au tour de Christophe Barbier « Redscarfman » de venir porter assistance au malheureux candidat de l’ESSEC qui vient d’essuyer un bel échec : « Richard, vous avez dit la vérité, et quel endroit plus beau qu’un palais de justice pour dire la vérité ! ». L’ensemble de ses notes ayant été lues par Cosima Ouhioun, qui manquait d’inspiration, eu égard la contre performance précédente, Christophe Barbier s’en est brillamment tiré avec une pirouette verbale et a félicité le courage des candidats qui ont su affronter un jury quelque peu excessif. Une conclusion corroborée par Louis Boré, ancien Secrétaire de la Conférence en 1996, qui n’a pas hésité à remettre en place certains secrétaires insolents en soulignant leurs remarques « très très ras des pâquerettes ».

Une soirée qui aura très certainement eu le mérite d’inspirer Christophe Barbier qui doit être « en panne de sujets », après avoir traité à maintes reprises « les francs-maçons, les musulmans et la crise de l’immobilier en Île-de-France ». Si cette joute oratoire a eu l’effet d’exutoire pour les participants, Christophe Barbier n’a toujours pas livré le secret de son écharpe rouge.

Daniel Latif