Célébration et symphonie de couleurs par Frank Bowling

Frank Bowling, né en 1934, est un artiste transatlantique, initialement expressionniste qui a vogué entre Londres à New-York. Diplômé et félicité du Royal College of Art à Londres en 1959, son style a évolué au fil des décennies. « Huit exactement », aime rappeler son fils Ben Bowling, qui dirige actuellement le studio Frank Bowling.

Petit à petit, Frank Bowling est devenu spécialiste de l’abstraction. Ayant toujours eu comme médium artistique la peinture, il n’a cessé d’explorer et d’expérimenter différentes techniques pour représenter ses mémoires et ses expériences personnelles. 

Plus qu’une école, plus qu’un simple objectif, Paris a toujours été « le centre du monde mais aussi un lieu d’inspiration » pour l’artiste qui n’avait qu’une obsession à l’époque, y faire une exposition. 

À 91 ans, et malgré de nombreuses expositions à travers le monde, il s’agit de la toute première exposition solo de Frank Bowling, intronisée chez Hauser & Wirth à Paris. Le « lieu relève d’une haute symbolique », se remémore Ben Bowling qui, il y a deux ans, transmettait à son père les photos de la galerie artistique encore en travaux. 

Il faut se souvenir qu’entre 1955 et 2018, le 26 bis rue François 1er a été le siège des radios Europe 1, Europe 2 et RFM. Un fief historique que Lagardère a revendu et qui s’est réincarné en immense galerie à travers plusieurs étages dédiées à l’art contemporain et moderne.

Ce lieu, dont la magnificence a définitivement inspiré l’artiste New-yorkais qui a peint en proportion ses œuvres qui atteignent pour certaines jusqu’à 4,5 mètres de hauteur. Elles ont été élaborées dans son atelier à Brooklyn, à East River, où Frank Bowling a dû composer en plusieurs étapes sur plusieurs mois pour élaborer de telles pièces gigantesques. 

Le résultat est tout simplement époustouflant et des plus inspirants. L’eau est un élément récurrent que l’on remarque dans le travail de Frank Bowling : « ce n’est pas seulement un collage, c’est une peinture qui imbrique plusieurs niveau de lecture, y compris dans son processus de fabrication de cette peinture » théorise Neil Wenman, Creative Director pour Hauser & Wirth, à propos des peintures intitulées Skid et Dawn. « Cela s’observe notamment par ce mouvement de gravité qui a été inversé », poursuit-il. 

Il en résulte une association de tableaux immenses où l’on devine des natures mortes dans un encadrement qui pourrait laisser croire que l’on fait face à plusieurs tableaux, mais en fait il s’agit d’une seule et unique pièce entière. Mêlant couleurs vives dans un enchevêtrement de strates où l’on distingue cette partie supérieure sorte de la sphère aérienne, un niveau terrestre et le dessous du sol. Cette observation se concrétise parfaitement sur le tableau intitulé Dancing, où Ben Bowling y décrit ce « coucher de soleil cataclysmique au-dessus d’arbres qui bordent une cascade d’eau »

« L’eau est essentielle pour la vie de mon père, il y fait de constantes références à travers ses œuvres » argumente Ben Bowling. Cette omniprésence procure cette sensation rafraîchissante qui invite le spectateur à plonger dans ses œuvres. Les interprétations sont nombreuses et l’artiste est entièrement ouvert à ce que le  visiteur puisse s’inspirer et y voir librement ce qui le touche. 

Le regard est absorbé par le panachage des couleurs entre les différents échos des tableaux mais il l’est d’autant plus par ces artefacts que l’artiste y a greffés. C’est de surcroît, l’une des caractéristiques que l’on retrouve dans les œuvres de Frank Bowling, ces différents souvenirs glanés, ça et là, dans son studio comme ce pinceau brosse plat, ces morceaux de feuilles ou ces bouts de ficelle, qui se marient harmonieusement bien avec les peintures. Une performance « un peu comme un D.J., où à la fin du spectacle, il lâche son micro » compare Neil Wenman. Ces objets sont comme un journal intime, une histoire narrative qui raconte la production du tableau. 

Toujours dans une inspiration créative mais avec l’envie de poursuivre son travail selon sa technique expérimentale bien personnelle, Frank Bowling joue avec les couleurs et les géométries, observe comment la peinture réagit, l’explose et la laisse s’étendre sur la toile. Il s’affranchit de la « technique du collage dans son sens conventionnel » et additionne les toiles selon un procédé de marouflage très particulier. 

Enfin, Ben Bowling — qui confesse ne pas toujours comprendre « d’où vient cette inspiration et cette création », synthétise l’esprit des œuvres de Frank Bowling à la façon d’un spectacle de jazz. Une performance qui donne du rythme et où l’improvisation a une place primordiale pour à chaque fois donner naissance à quelque chose des plus authentique, des plus singuliers pour ne pas dire unique. 

Exposition du 22 mars au 26 mai 2025

Hauser & Wirth Paris
26 bis rue François 1er
75008 Paris

L’Arlatan : hôtel très particulier à Arles

Au détour d’une flânerie autour des arènes d’Arles, il est difficile d’imaginer que la rue du Sauvage abrite un immense hôtel particulier qui s’étend sur plus de 4 000 mètres carrés. 

À tel point, qu’une fois le check-in effectué, le réceptionniste vous accompagne jusqu’à votre chambre afin de vous orienter dans ce labyrinthe. Et pour cause, nous traversons cette cour, pavée de vieilles pierres, qui mêle une ambiance à la fois tropicale et provençale. On aperçoit à droite, une piscine extérieure dont on devine déjà la température glaciale. Nous nous engouffrons dans cet autre bâtiment où se trouve le restaurant, ensuite nous arrivons à une autre porte qui mène à un escalier en colimaçon qui vous emporte dans un tourbillon aux inspirations art contemporain où trône un chandelier des plus arty. Nous traversons le palier du premier étage, puis passons une autre porte et arrivons enfin dans un couloir des plus cinématographiques dont le sol a été orné de mosaïques faites à la main. 

Les portes et leur encadrement font penser à des toiles de peintures à l’huile aux motifs des plus abstraits. Une fois déverrouillée et le seuil franchi, l’on est aussitôt empli par la chaleur des couleurs vives dominant la pièce qui est très haut de plafond et laisse apercevoir ces poutres apparentes centenaires ou encore ce pan de mur d’une ancienne basilique romaine. 

Cette décoration multi couleur des plus ensoleillées est l’œuvre de l’artiste cubain Jorge Pardo qui s’est assuré de prolonger cette continuité esthétique des mosaïques jusque dans la salle de bain. 

Le mobilier, lui non plus, n’a pas été négligé avec cette chaise à bascule et son repose pied rétro, ces luminaires nébuleux ou encore ces armoires uniques et sur mesure qui au-delà de leur fonctionnalité s’élèvent au rang d’œuvre d’art. 

Des nougats caramels, mais également des fruits vous sont offerts avec ces bouteilles, d’eau plate ou pétillante, en verre. Des victuailles, qu’il faut absolument déguster dans un bain de mousse avec cette « gelée lavante » à la lavande de Végétalement Provence. 

On ne pouvait rêver mieux pour se détendre avant de s’endormir dans une literie des plus confortables et aux traversins qui vous feront passer une belle nuitée.

Daniel Latif

Visite théâtralisée du Musée Jacquemart-André

C’est au détour d’une déambulation dans le VIIIème arrondissement de Paris, qu’on découvre quelques joyaux architecturaux comme cet hôtel particulier du XIXème siècle où se trouve le Musée Jacquemart-André.

Habituellement, l’on y découvre une riche collection dans une ambiance intimiste à travers un parcours labyrinthique, défilant les différents salons majestueux où les peintures, sculptures, meubles, tapisseries et objets d’arts font voyager de part en part entre le XVI et XIXème siècle. 

Ce week-end, et pour la deuxième édition, certains chanceux ont pu faire l’expérience d’une visite théâtralisée. L’occasion de redécouvrir les lieux avec une performance singulière des jeunes comédiens de l’association Héritages, tous élégamment costumés pour une immersion encore plus surréaliste dans l’intimité des anciens maîtres des lieux.

Les majordomes qui vous accueilleront sur le perron de la Cour d’honneur, suivez ensuite les valets qui vous guideront le long des salons où vous rencontrerez les soubrettes puis laissez-vous surprendre et embarquer dans un voyage, le temps d’une flânerie interactive, avec des comédiens dont l’écriture de la pièce de théâtre et la confection des costumes été entièrement réalisée par leur soins.

Daniel Latif
Photos : DL /DR

Central Park on ice

Il s’agit probablement de la patinoire la plus connue dans le monde : la patinoire Wollman Ice rink NYC. Même si vous n’avez jamais été à New-York, vous l’avez probablement aperçue dans cette scène du cultissime film Maman, j’ai encore raté l’avion, Home Alone 2, avec les casseurs flotteurs, qui prévoient leur prochain sale coup.

Cachée au cœur de Central Park, cette immense patinoire à ciel ouvert, avec de la vraie glace, elle offre une vue à couper le souffle sur les gratte-ciels de Manhattan. Pour y accéder, la meilleure entrée se trouve du côté du Plaza Hotel, ou bien au gré d’une déambulation dans Central Park, ce qui, comme pour moi, aura le mérite d’encore plus vous surprendre. 

Cette patinoire iconique, symbole de l’hiver à New-York, est plus qu’une simple piste où l’on tourne en rond. En effet, elle accueille sur un pan des entraînements de hockey ou de patin artistique, pour tous les âges. On se laisse rêver à la vue de la Billionaires’ Row, une nouvelle génération de gratte-ciel ultra fins mais dont la hauteur ultra dominante est une autre façon pour les milliardaires d’afficher encore plus leur richesse.

Les patineurs sont choyés par du très bon son. Mieux qu’une playlist musicale, la patinoire Wollman dispose de sa propre radio avec ses jingles qui s’enchaînent proprement et garantissent l’effet féérie de façon constante. La bonne ambiance est au rendez-vous, des chefs de piste sont présents et s’assurent que tout se passe comme sur des roulettes. C’est le moment crépusculaire, un magnifique panachage de couleur s’étire dans le ciel pour rapidement afficher cette carte postale d’un New-York by night où toutes les lumières des tours depuis longtemps désertées restent allumées. 

C’est également un lieu où l’on peut se restaurer au Wollman Café où sont servies des boissons chaudes et des snacks. La patinoire Wollman ice rink propose des petits espaces dédiés et privatifs pour différentes occasions. Une bonne raison de chausser les patins et de serpenter sur la glace d’un lieu mythique qui fête aujourd’hui ses 75 ans. Argument ultime, qui m’a fait chausser, pour la première fois depuis le siècle dernier, des patins de location. Alors, à tous les patineurs en partance pour New-York, n’oubliez pas d’emporter vos patins à glace — et votre brosse à dents, bien-sûr !

Daniel Latif

The House from : les maisons cultes au-delà des murs

« 295 Lafayette Street », « 90 Bedford Street » ou bien « 66 Perry Street » à New-York ou encore le « 1709 Broderick Street » à San Francisco…

Ces adresses ne sont peut-être qu’un détail pour vous, mais pour les fans ça veut dire beaucoup. Il s’agit, en effet, des maisons ou façades d’appartements que l’on aperçoit dans ces films ou séries télé, plus connues sous le nom de plans généraux ou establishing shots, dans le jargon Hollywoodien. 

Le réalisateur Tommy Avallone s’est intéressé aux relations parasociales qui lient les fans de séries — et parfois même les acteurs — à des lieux qu’ils n’ont jamais connus ou qui n’ont jamais existé.

Et pour cause, même si les façades des appartements sont New-Yorkaises ou que les maisons aperçues se trouvent à Philadelphie ou Chicago, ce n’est qu’un leurre, car la grande majorité de ces productions cinématographiques sont tournées en studio à Los Angeles. À la grande déception d’un grand nombre de spectateurs qui longtemps ont cru que ces maisons étaient réellement les lieux de tournage ou de vie des acteurs. 

Ceci pourrait être le début d’une piste pouvant expliquer cet attachement émotionnel qui pousse inlassablement foison de touristes à se rendre devant ces lieux à la façon d’un pèlerinage.

Disponible en visionnage sur iTunes et sur Amazon video, The House from… est un documentaire enthousiaste d’une heure quarante pendant lesquelles l’on suit Tommy Avallone à la rencontre de ces fans de séries, des voisins mais surtout des propriétaires de résidences plus que familières, comme la résidence de Kevin dans Maman, j’ai raté l’avion, qui nous partagent leur quotidien, le rôle et l’engagement vis-à-vis des fans puis la charge que ces célèbres demeures leur confèrent. 

Mieux que des simples coulisses de tournage, il s’agit d’une réelle investigation autour d’éléments topographiques, certes triviaux, de formats télévisuels qui font désormais partie de la culture populaire et représentent un réel marqueur socioculturel pour toute une génération aujourd’hui, comme Anne-Charlotte, inconditionnelle de la sitcom Friends qui raconte l’avoir « tellement vue, qu’elle a,  l’impression de pouvoir s’y repérer sans jamais y être allée »

Une exploration qui mène à une réflexion autour de ces lieux tellement présents dans les media, comparable avec ces aventures en urbex : fortement chargées en histoire, mais dont il vaudrait mieux se contenter d’admirer la façade extérieure iconique et s’abstenir de les visiter. Car, au-delà, il y a le risque d’être tout simplement déçu et de se retrouver face à un NPAI.

Daniel Latif

Lounge de New-York : la french touch AF à NY

Situé à l’autre extrémité de l’aéroport John F. Kennedy, le salon Air France de New-York cache derrière une porte opaque vitrée un lounge inattendu. En effet, un salon en duplex avec dès l’entrée à votre droite, l’espace soin Clarins qui propose vingt minutes de relaxation et un soin du visage. 

Le rez-de-chaussée est plein alors l’on prend l’escalator pour accéder à cette extension à l’étage qui offre la plus belle vue sur la piste et les avions, mais surtout sur la Skyline de New-York — particulièrement lors du coucher de soleil. 

Le mobilier se compose essentiellement de chaises et tables dans une configuration deux personnes, si bien que vous vous retrouverez rapidement à manquer de place car les passagers aiment à occuper l’autre fauteuil avec leurs sac ou blouson. Car, on déteste tous devoir partager une table avec un inconnu et c’est bien dommage. 

Une table et une rotonde sont délimitées par un ruban rouge Sky Priority, et une pancarte indique clairement réservé aux clients Ultimate. Il s’agit du plus haut statut voyageur chez Air France, et les compagnies faisant partie de Sky team, qui voyagent six fois plus qu’un passager Platinum. 

Côté buffet, Air France vous propose des plats chauds typiques français comme un bœuf bourguignon, un gratin dauphinois bien chargé de fromage qui file abondamment, du saumon lentement cuit, à la texture fondante, et enfin les incontournables quiches et croque-monsieur. 

Les palmiers on ne peut plus étouffe-chrétien, la tarte aux pommes visuellement alléchante qui s’est révélée des plus industrielles, heureusement les madeleines de qualité ont ce goût de reviens-y et se marient parfaitement avec le champagne Joseph Perrier, cuvée Royale, dont la bouteille ventrue et son col serré rappelle ces anciens beaux flacons. 

Côté vin rouge, Air France ne plaisante pas et propose un Bourgogne 2022 Joseph Drouhin. On reste dans la région avec cette curiosité, ce Gin de la maison Gabriel Boudier, liquoriste à Dijon depuis 1874. 

Après un tel festin, l’envie d’une sieste est des plus tentante, et si en plus vous aviez rendez-vous à l’espace soin Clarins, prenez garde à ne pas vous endormir dans cette bulle de relaxation des plus reposantes.

C’est le moment crépusculaire et l’on a absolument plus l’envie de décoller. Et pourtant, l’embarquement a déjà commencé. Let’s go et bon voyage, comme ils disent ici.

Salut la compagnie !

Coup de foudre à la Trump Tower

À quelques encablures de Central Park, sur la 5ème avenue, se trouve la Trump Tower. Sous le premier mandat de Donald Trump, les agents des services secrets y montaient la garde en permanence et les visiteurs devaient passer à travers un portique de sécurité avec des contrôles similaires aux aéroports en raison de la présence très régulière du magnat de l’immobilier qui y séjourne notamment les weekend. 

Le Président Trump réside désormais à la Maison Blanche à Washington. Il y a toujours une présence policière aux alentours mais plus de contrôle à l’entrée de la Trump Tower. 

Assis au bar du restaurant le « Trump Grill » — où trône un tableau du charismatique père de Donald, Fred Trump — je décide de tester le fameux menu « Prix fixe » à 47 dollars. En entrée, c’est salade César ou soupe du jour.

À ma gauche, au bout du comptoir, Jeff, habillé d’un jean Levi’s et d’un pull rose, double chaîne, dont une avec une croix bien pendante, au look typique étasunien. L’homme a un certain flegme, dont l’intonation de voix charismatique, qui rappellerait un personnage tout droit sorti d’une de ces sitcoms US des années 90. Il semble bien connaître la maison et s’entretient régulièrement avec Luca, la directrice du restaurant.

Arrive une dame avec son bonnet sur la tête, qui s’installe à ses côtés. Elle commande une coupe de Champagne, lui a déjà sa pinte de bière. Ils se regardent, se sourient et ont l’air de se connaître puis commencent à échanger des banalités sur leur début de journée quand soudain, la femme retire son bonnet et enlève son manteau :
« enchanté, je suis Lisa, je suis de Californie
Pareillement, Jeff, je suis de Pennsylvanie »

Serait-ce un début de « date » après avoir déjà conversé en ligne ou une conversation codée ? Je tends l’oreille, tout en finissant la soupe minestrone. 

Arrive un jeune homme qui demande s’il peut s’asseoir aux côtés de Lisa. Il commande un « Burger Trump » et un Coca-Cola, puis se joint naturellement à leur conversation, comme s’il était un ami de longue date. Le « Burger Trump » est un burger signature dont la sauce est « spéciale » au « fromage américain ». Pas impressionnant du tout. Le garçon plie son déjeuner, paye et s’en va aussitôt.

Il me reste encore trois alternatives : le « black bean burger », version végétarienne avec sauce Chipotle, fromage américain, avocat et pickles d’oignons. Non, merci ! Le « Cajun chicken sandwich », fromage au poivre, bacon, mayonnaise chipotle et avocat. Bof…

Enfin, le « Prime NY Strip steak », une belle pièce de bœuf recouvert de sauce au poivre, saupoudré de persil et accompagné de frites maison. « C’est le plat préféré de Donald Trump » recommande Luca. Pour ce plat, comptez un supplément de 20 $. 

Vient la question cruciale de la cuisson :
« rare, s’il vous plaît
Saignant ?
Tout à fait ! » lancé-je impressionné

Pendant ce temps, nos deux amis échangeaient sur leurs vies respectives : « j’étais marié, divorcé, contrairement à mes frères et sœurs, je n’ai fait aucune étude mais j’ai toujours su me débrouiller. Et j’ai pris ma retraite anticipée quand j’ai vu que tout le monde autour de moi disparaissait. C’est à ce moment que j’ai pris conscience qu’il était temps de vivre » confesse Jeff à Lisa qui boit ses paroles…

Arrive le fameux plat préféré du Président Trump. Un verre de vin est offert dans le « prix fixe menu », j’opte pour le verre de Showdown, un vin rouge Cabernet sauvignon de Californie. Un étonnant rouge, à la robe puissante, parfaitement construit, qui inspire le soleil à chaque gorgée, laissant de douces notes sucrées en bouche.

Le fondant du « Prime NY Strip Steak », dont la cuisson parfaitement maîtrisée, sa sauce au poivre mêlée à son jus qui donne encore plus de saveur aux frites, faites maison, ponctué de ce surprenant vin californien m’ont plongé dans un moment hors du temps où je savoure chaque bouchée. 

« Ce jeune homme a l’air de se régaler » commente Lisa, qui poursuit dans le récit en détail de son curriculum vitæ avec Jeff, tout en m’observant.

« Cette viande me donne l’envie d’en prendre une bouchée, vous me la recommandez ? Relance-t-elle
Absolument, tout est délicieux ! Habituellement, je n’aime pas les frites mais là je me suis délecté de leur fraîcheur et de leur croustillant.
Ça se voit, je vous observe depuis tout à l’heure et nous autres américains nous mangeons trop vite. Je n’ai jamais vu quelqu’un manger avec autant de raffinement et prendre autant son temps. Ça doit être le côté français. Et de poursuivre, enchanté, moi c’est Lisa et voici Jeff, nous venons de nous rencontrer à l’instant.
Votre proximité, vos regards dégagent une harmonie qui laisse à croire que vous vous connaissez depuis de nombreuses années.
Et pourtant… je viens tout juste de le rencontrer : je me suis approchée pour prendre un verre avec ce monsieur, car il m’intriguait. Vous pensez qu’on va finir ensemble ?
Je perçois une complicité qui vous conduira vers une grande amitié, qui mènera naturellement aux grandes amours.

Lisa semble ravie de connaître ma perception, Jeff en rougit et se rapprochant d’elle : « c’est vrai qu’on s’entend bien alors qu’on vient seulement de se rencontrer », lance-t-il tout émoustillé. Ils se regardent et s’embrassent aussitôt. Le spectacle amoureux est aussi beau que spontané. 

Le chef a été généreux, j’ai eu deux boules de glace au café. Servies dans ce pot en carton « Trump sweets », je me saisis de la cuillère en plastique et prends une bouchée. Lisa ne perd pas le Nord : « je vais vous commander un steak, comme celui du jeune homme qui me donne envie » annonce-t-elle à Luca. 
Il est quinze heures Madame, les cuisines sont fermées. »

Jeff lui propose d’aller manger dans un restaurant qu’il connaît dans le quartier, ce qu’elle accepte. Il paye, elle refuse, elle veut payer, il insiste, elle hausse le ton : « Jeff, stop it ! »

Elle demande à la maîtresse des lieux le livre d’or de Trump puis s’éloigne pour y écrire un mystérieux message. 

Elle revient et prend Jeff par le bras : « allons-y !
Qu’as-tu écrit dans le livre d’or ?
Un message personnellement adressé à Donald Trump.
M. Trump lit personnellement tous les messages qui y sont inscrits » précise Luca qui referme soigneusement le livre et le range aussitôt. 

Eu regard du grand sourire dessiné sur le visage de Luca, on pourrait très probablement penser que Lisa a pris le soin d’informer le Président Trump qu’il devrait adapter les horaires de son restaurant au rythme New-Yorkais.

Pas le temps de roter dans un moyen courrier

Quand c’est pas dans le lounge, Michel Roth invite aussi à sa table dans les airs à bord d’un Embraer 170. Le ticket d’entrée pour accéder à la cuisine de ce Chef français, Meilleur ouvrier de France et Bocuse d’Or, est au prix d’une carte d’embarquement en Business.

Au menu de ce repas presque gastronomique dans les airs : Crevettes snackées, sauce homardine à l’estragon, riz rouge, champignons et sarrasin grillé.

Pas évident de manger sur son plateau lorsque le voisin de devant a incliné son siège à fond. On se retrouve donc obligé de jouer les acrobates avec les couverts et forcément à en mettre même partout.

La tranche de Cantal AOP et de Saint-Nectaire n’auront pas fait long feu. Surtout avec ce pain cosmique, sorte de bloc sorti des fourneaux de l’espace qui ne donne absolument pas envie mais qui avec ce beurre doux reste passable.

On ne va pas se plaindre, c’est toujours mieux que le pseudo morceau de pain tartiné qu’on refuse volontiers mais qu’on prend quand même parce qu’on a faim.

« PNC niveau 100 », jargonne le pilote à la radio. L’avion entame sa descente, le plateau, lui aussi, suit la trajectoire et commence à pencher.

Les oreilles se bouchent, je n’ai pas encore entamé ce moelleux au chocolat. Je demande une coupe pour accompagner le dessert. L’hôtesse troque mon plateau contre un verre. J’avale en deux temps trois mouvements ce fondant qui n’a pas vraiment fondu.

Dix minutes plus tard, nous atterrissons. Pas même eu le temps d’un café ou d’un thé — ni même de roter. C’est le jeu du moyen courrier.

Allez, salut la compagnie !

Iberia ne baisse pas les bras

« Iberia, no me gusta ! » c’est ce que j’ai lancé à ce passager italien qui se lamentait de ne pas avoir plus d’information sur le retard ou l’éventuelle annulation du vol IB3406, Madrid – Orly. 

Notre vol semblait compromis depuis ce matin où un mail de la compagnie nationale espagnole nous informait d’un changement d’horaire sur le vol initialement prévu pour 14h. Certains confrères avaient déjà reçu leur carte d’embarquement pour le vol de 16h.

Le vol de 11h, annoncé porte M24 et 25, est affiché en retard sur les écrans mais toujours pas de porte affichée pour celui de 14h. Voyant tout le monde scotché devant les écrans, en attendant Godot, je décide quand même de me diriger vers la porte M24. Un pari risqué, car les portes M sont situées à l’autre extrémité de l’aéroport et pour y accéder, il faut prendre une navette. Allez, salut la compagnie !

Après un périple digne d’un parcours UTMB, à descendre des escalators, embarquer dans la navette, faire un trajet assez conséquent puis remonter des escaliers, j’arrive enfin devant la porte d’embarquement M24. Seul, devant le comptoir, le vol pour Orly de 11h y est bien affiché. 

Ce n’est qu’une vingtaine de minutes plus tard qu’une horde de voyageurs arrive. Ça y est, ça commence déjà à soupirer, d’autres à se prendre la tête. Puis, les fameux impatients aux cents pas, qui vont et viennent au comptoir. Arrive enfin une hôtesse d’escale, toute tranquille qui s’installe à son ordinateur feignant de ne pas entendre la rumeur qui gronde. 

Voyant tout le monde s’affairer avec leur carte d’embarquement, je décide de vérifier mon billet. Et là, c’est la panique… le numéro de vol de ma carte d’embarquement ne colle pas avec celui affiché sur l’écran. Je me connecte aussitôt sur le site Iberia, je procède au check-in avec le risque de voir ma carte précédente annulée et de voir un message qui me ferait perdre toute dignité, surtout que je suis le premier de la file pour embarquer.

Choix du vol, clic, clic… choix du siège, clac clac… tiens donc,  je viens de passer du siège 15F au siège 15J. Je lève les yeux et me rends compte de la présence d’un Airbus A350-900 en bout de la passerelle aéroportuaire. Iberia aurait-il affrété ce bel oiseau flambant neuf pour rattraper le retard des deux vols ? Un collègue trouve l’entreprise trop ambitieuse pour un moyen courrier. Bingo, mon intuition était la bonne. 

Nostalgie à bord d’un Airbus A350

C’est ainsi que j’ai pu embarquer pour la première fois à bord d’un Airbus A350, un imposant coucou qui trône juste en face de son grand frère le regretté Airbus A380-800, toujours opérationnel chez Emirates — mais qu’Air France s’est empressé de se débarrasser après la pandémie. Même s’il n’a qu’un seul étage, l’A350 a un gabarit assez conséquent et on le ressent rien qu’à l’embarquement. 

À bord, je me retrouve en classe Premium economy, avec des sièges relativement confortables, des vrais casques audio englobants les oreilles pour réduire le bruit en cabine mais surtout la possibilité de relever les jambes comme le fauteuil de Joey et Chandler dans Friends

En parlant de Friends, l’écran en face à moi propose un catalogue de films et de séries télé à faire pâlir n’importe quelle plateforme. En effet, parmi la pléthore de sitcoms, les 10 saisons de Friends y sont proposées, également la saison 1 de The Golden Girls. Nous sommes bien en 2024, vous ne rêvez pas ! Et pour cause, le reboot de Full House, plus connu sous le nom de la Fête à la maison, Fuller House, y est proposé ou encore le sequel de la cultissime série Will & Grace, une suite, onze ans après, avec les même acteurs. 

Voilà de quoi ravir certains spécialistes sérivores. Seul souci, le vol ne dure pas longtemps, les instructions de sécurité et les interminables annonces inutiles puis tout le blabla — en espagnol et en anglais — du pilote s’excusant pour le retard ont pour effet de mettre en pause la diffusion. Or, le petit carré en bas de l’écran m’indique qu’il ne reste 1h18 avant l’atterrissage. Il va falloir être précis dans son choix de programmation. Challenge accepté, c’est parti pour le marathon de sitcoms. 

Daniel Latif

Demi Sky Priority

C’est une nouvelle mode dans certains aéroports tels que Nice, Marseille, Copenhague, Istanbul, Barcelone, Hanover, Milan, entre autres… que de vous frustrer lors d’un voyage à deux. En effet, si votre billet vous permet de passer en Sky Priority et que vous voyagez avec votre ami, compagne, collègue ; ce dernier sera systématiquement refoulé du « fast track ». Lumière rouge à Barcelone pour mon photographe qui m’accompagne sur un reportage : « Monsieur est avec moi…
– Non, il ne peut pas vous accompagner
– Si, il est avec moi, nous voyageons sur le même vol »

La dame tient absolument à jouer les chefaillons : « vous : oui ; lui, non »

Un policier passe à cet instant, voyant que la situation est toujours bloquée. Il inspecte mon billet et ne comprend pas non plus pourquoi madame ne veut pas me laisser passer avec mon accompagnant. N’osant pas contrarier sa collègue, il hausse les épaules et s’excuse de ne pouvoir rien faire dans cette situation. 

Ce cas n’a plus rien de trivial et se produit souvent dans de nombreux aéroports, où l’on pourrait penser que chaque passage est facturé et retenu sur les salaires de ces sheriffs d’aéroport. Pourtant, il ne s’agit qu’un peu de bon sens et d’un minimum d’intelligence. 

Du côté d’Air France, on nous confirme bien que « ce manquement n’est conforme aux engagements Sky Priority envers les clients et afin d’éviter qu’une telle situation ne se reproduise » cette énième mésaventure « a été prise en compte dans l’amélioration de notre service »

Voilà, comment un voyage peut rapidement mal tourner parce que votre compagne ou ami vous lance, avec un regard des plus culpabilisateurs : « donc, tu vas me laisser seul pour prendre les contrôles normaux ? »

Décision crève-cœur, qui semble être des plus égoïstes, certes, mais mieux vaut un demi Sky Priority, que plus de Sky Priority

Allez, salut la Compagnie !

Daniel Latif