L’Arlatan : hôtel très particulier à Arles

Au détour d’une flânerie autour des arènes d’Arles, il est difficile d’imaginer que la rue du Sauvage abrite un immense hôtel particulier qui s’étend sur plus de 4 000 mètres carrés. 

À tel point, qu’une fois le check-in effectué, le réceptionniste vous accompagne jusqu’à votre chambre afin de vous orienter dans ce labyrinthe. Et pour cause, nous traversons cette cour, pavée de vieilles pierres, qui mêle une ambiance à la fois tropicale et provençale. On aperçoit à droite, une piscine extérieure dont on devine déjà la température glaciale. Nous nous engouffrons dans cet autre bâtiment où se trouve le restaurant, ensuite nous arrivons à une autre porte qui mène à un escalier en colimaçon qui vous emporte dans un tourbillon aux inspirations art contemporain où trône un chandelier des plus arty. Nous traversons le palier du premier étage, puis passons une autre porte et arrivons enfin dans un couloir des plus cinématographiques dont le sol a été orné de mosaïques faites à la main. 

Les portes et leur encadrement font penser à des toiles de peintures à l’huile aux motifs des plus abstraits. Une fois déverrouillée et le seuil franchi, l’on est aussitôt empli par la chaleur des couleurs vives dominant la pièce qui est très haut de plafond et laisse apercevoir ces poutres apparentes centenaires ou encore ce pan de mur d’une ancienne basilique romaine. 

Cette décoration multi couleur des plus ensoleillées est l’œuvre de l’artiste cubain Jorge Pardo qui s’est assuré de prolonger cette continuité esthétique des mosaïques jusque dans la salle de bain. 

Le mobilier, lui non plus, n’a pas été négligé avec cette chaise à bascule et son repose pied rétro, ces luminaires nébuleux ou encore ces armoires uniques et sur mesure qui au-delà de leur fonctionnalité s’élèvent au rang d’œuvre d’art. 

Des nougats caramels, mais également des fruits vous sont offerts avec ces bouteilles, d’eau plate ou pétillante, en verre. Des victuailles, qu’il faut absolument déguster dans un bain de mousse avec cette « gelée lavante » à la lavande de Végétalement Provence. 

On ne pouvait rêver mieux pour se détendre avant de s’endormir dans une literie des plus confortables et aux traversins qui vous feront passer une belle nuitée.

Daniel Latif

Central Park on ice

Il s’agit probablement de la patinoire la plus connue dans le monde : la patinoire Wollman Ice rink NYC. Même si vous n’avez jamais été à New-York, vous l’avez probablement aperçue dans cette scène du cultissime film Maman, j’ai encore raté l’avion, Home Alone 2, avec les casseurs flotteurs, qui prévoient leur prochain sale coup.

Cachée au cœur de Central Park, cette immense patinoire à ciel ouvert, avec de la vraie glace, elle offre une vue à couper le souffle sur les gratte-ciels de Manhattan. Pour y accéder, la meilleure entrée se trouve du côté du Plaza Hotel, ou bien au gré d’une déambulation dans Central Park, ce qui, comme pour moi, aura le mérite d’encore plus vous surprendre. 

Cette patinoire iconique, symbole de l’hiver à New-York, est plus qu’une simple piste où l’on tourne en rond. En effet, elle accueille sur un pan des entraînements de hockey ou de patin artistique, pour tous les âges. On se laisse rêver à la vue de la Billionaires’ Row, une nouvelle génération de gratte-ciel ultra fins mais dont la hauteur ultra dominante est une autre façon pour les milliardaires d’afficher encore plus leur richesse.

Les patineurs sont choyés par du très bon son. Mieux qu’une playlist musicale, la patinoire Wollman dispose de sa propre radio avec ses jingles qui s’enchaînent proprement et garantissent l’effet féérie de façon constante. La bonne ambiance est au rendez-vous, des chefs de piste sont présents et s’assurent que tout se passe comme sur des roulettes. C’est le moment crépusculaire, un magnifique panachage de couleur s’étire dans le ciel pour rapidement afficher cette carte postale d’un New-York by night où toutes les lumières des tours depuis longtemps désertées restent allumées. 

C’est également un lieu où l’on peut se restaurer au Wollman Café où sont servies des boissons chaudes et des snacks. La patinoire Wollman ice rink propose des petits espaces dédiés et privatifs pour différentes occasions. Une bonne raison de chausser les patins et de serpenter sur la glace d’un lieu mythique qui fête aujourd’hui ses 75 ans. Argument ultime, qui m’a fait chausser, pour la première fois depuis le siècle dernier, des patins de location. Alors, à tous les patineurs en partance pour New-York, n’oubliez pas d’emporter vos patins à glace — et votre brosse à dents, bien-sûr !

Daniel Latif

Lounge de New-York : la french touch AF à NY

Situé à l’autre extrémité de l’aéroport John F. Kennedy, le salon Air France de New-York cache derrière une porte opaque vitrée un lounge inattendu. En effet, un salon en duplex avec dès l’entrée à votre droite, l’espace soin Clarins qui propose vingt minutes de relaxation et un soin du visage. 

Le rez-de-chaussée est plein alors l’on prend l’escalator pour accéder à cette extension à l’étage qui offre la plus belle vue sur la piste et les avions, mais surtout sur la Skyline de New-York — particulièrement lors du coucher de soleil. 

Le mobilier se compose essentiellement de chaises et tables dans une configuration deux personnes, si bien que vous vous retrouverez rapidement à manquer de place car les passagers aiment à occuper l’autre fauteuil avec leurs sac ou blouson. Car, on déteste tous devoir partager une table avec un inconnu et c’est bien dommage. 

Une table et une rotonde sont délimitées par un ruban rouge Sky Priority, et une pancarte indique clairement réservé aux clients Ultimate. Il s’agit du plus haut statut voyageur chez Air France, et les compagnies faisant partie de Sky team, qui voyagent six fois plus qu’un passager Platinum. 

Côté buffet, Air France vous propose des plats chauds typiques français comme un bœuf bourguignon, un gratin dauphinois bien chargé de fromage qui file abondamment, du saumon lentement cuit, à la texture fondante, et enfin les incontournables quiches et croque-monsieur. 

Les palmiers on ne peut plus étouffe-chrétien, la tarte aux pommes visuellement alléchante qui s’est révélée des plus industrielles, heureusement les madeleines de qualité ont ce goût de reviens-y et se marient parfaitement avec le champagne Joseph Perrier, cuvée Royale, dont la bouteille ventrue et son col serré rappelle ces anciens beaux flacons. 

Côté vin rouge, Air France ne plaisante pas et propose un Bourgogne 2022 Joseph Drouhin. On reste dans la région avec cette curiosité, ce Gin de la maison Gabriel Boudier, liquoriste à Dijon depuis 1874. 

Après un tel festin, l’envie d’une sieste est des plus tentante, et si en plus vous aviez rendez-vous à l’espace soin Clarins, prenez garde à ne pas vous endormir dans cette bulle de relaxation des plus reposantes.

C’est le moment crépusculaire et l’on a absolument plus l’envie de décoller. Et pourtant, l’embarquement a déjà commencé. Let’s go et bon voyage, comme ils disent ici.

Salut la compagnie !

Coup de foudre à la Trump Tower

À quelques encablures de Central Park, sur la 5ème avenue, se trouve la Trump Tower. Sous le premier mandat de Donald Trump, les agents des services secrets y montaient la garde en permanence et les visiteurs devaient passer à travers un portique de sécurité avec des contrôles similaires aux aéroports en raison de la présence très régulière du magnat de l’immobilier qui y séjourne notamment les weekend. 

Le Président Trump réside désormais à la Maison Blanche à Washington. Il y a toujours une présence policière aux alentours mais plus de contrôle à l’entrée de la Trump Tower. 

Assis au bar du restaurant le « Trump Grill » — où trône un tableau du charismatique père de Donald, Fred Trump — je décide de tester le fameux menu « Prix fixe » à 47 dollars. En entrée, c’est salade César ou soupe du jour.

À ma gauche, au bout du comptoir, Jeff, habillé d’un jean Levi’s et d’un pull rose, double chaîne, dont une avec une croix bien pendante, au look typique étasunien. L’homme a un certain flegme, dont l’intonation de voix charismatique, qui rappellerait un personnage tout droit sorti d’une de ces sitcoms US des années 90. Il semble bien connaître la maison et s’entretient régulièrement avec Luca, la directrice du restaurant.

Arrive une dame avec son bonnet sur la tête, qui s’installe à ses côtés. Elle commande une coupe de Champagne, lui a déjà sa pinte de bière. Ils se regardent, se sourient et ont l’air de se connaître puis commencent à échanger des banalités sur leur début de journée quand soudain, la femme retire son bonnet et enlève son manteau :
« enchanté, je suis Lisa, je suis de Californie
Pareillement, Jeff, je suis de Pennsylvanie »

Serait-ce un début de « date » après avoir déjà conversé en ligne ou une conversation codée ? Je tends l’oreille, tout en finissant la soupe minestrone. 

Arrive un jeune homme qui demande s’il peut s’asseoir aux côtés de Lisa. Il commande un « Burger Trump » et un Coca-Cola, puis se joint naturellement à leur conversation, comme s’il était un ami de longue date. Le « Burger Trump » est un burger signature dont la sauce est « spéciale » au « fromage américain ». Pas impressionnant du tout. Le garçon plie son déjeuner, paye et s’en va aussitôt.

Il me reste encore trois alternatives : le « black bean burger », version végétarienne avec sauce Chipotle, fromage américain, avocat et pickles d’oignons. Non, merci ! Le « Cajun chicken sandwich », fromage au poivre, bacon, mayonnaise chipotle et avocat. Bof…

Enfin, le « Prime NY Strip steak », une belle pièce de bœuf recouvert de sauce au poivre, saupoudré de persil et accompagné de frites maison. « C’est le plat préféré de Donald Trump » recommande Luca. Pour ce plat, comptez un supplément de 20 $. 

Vient la question cruciale de la cuisson :
« rare, s’il vous plaît
Saignant ?
Tout à fait ! » lancé-je impressionné

Pendant ce temps, nos deux amis échangeaient sur leurs vies respectives : « j’étais marié, divorcé, contrairement à mes frères et sœurs, je n’ai fait aucune étude mais j’ai toujours su me débrouiller. Et j’ai pris ma retraite anticipée quand j’ai vu que tout le monde autour de moi disparaissait. C’est à ce moment que j’ai pris conscience qu’il était temps de vivre » confesse Jeff à Lisa qui boit ses paroles…

Arrive le fameux plat préféré du Président Trump. Un verre de vin est offert dans le « prix fixe menu », j’opte pour le verre de Showdown, un vin rouge Cabernet sauvignon de Californie. Un étonnant rouge, à la robe puissante, parfaitement construit, qui inspire le soleil à chaque gorgée, laissant de douces notes sucrées en bouche.

Le fondant du « Prime NY Strip Steak », dont la cuisson parfaitement maîtrisée, sa sauce au poivre mêlée à son jus qui donne encore plus de saveur aux frites, faites maison, ponctué de ce surprenant vin californien m’ont plongé dans un moment hors du temps où je savoure chaque bouchée. 

« Ce jeune homme a l’air de se régaler » commente Lisa, qui poursuit dans le récit en détail de son curriculum vitæ avec Jeff, tout en m’observant.

« Cette viande me donne l’envie d’en prendre une bouchée, vous me la recommandez ? Relance-t-elle
Absolument, tout est délicieux ! Habituellement, je n’aime pas les frites mais là je me suis délecté de leur fraîcheur et de leur croustillant.
Ça se voit, je vous observe depuis tout à l’heure et nous autres américains nous mangeons trop vite. Je n’ai jamais vu quelqu’un manger avec autant de raffinement et prendre autant son temps. Ça doit être le côté français. Et de poursuivre, enchanté, moi c’est Lisa et voici Jeff, nous venons de nous rencontrer à l’instant.
Votre proximité, vos regards dégagent une harmonie qui laisse à croire que vous vous connaissez depuis de nombreuses années.
Et pourtant… je viens tout juste de le rencontrer : je me suis approchée pour prendre un verre avec ce monsieur, car il m’intriguait. Vous pensez qu’on va finir ensemble ?
Je perçois une complicité qui vous conduira vers une grande amitié, qui mènera naturellement aux grandes amours.

Lisa semble ravie de connaître ma perception, Jeff en rougit et se rapprochant d’elle : « c’est vrai qu’on s’entend bien alors qu’on vient seulement de se rencontrer », lance-t-il tout émoustillé. Ils se regardent et s’embrassent aussitôt. Le spectacle amoureux est aussi beau que spontané. 

Le chef a été généreux, j’ai eu deux boules de glace au café. Servies dans ce pot en carton « Trump sweets », je me saisis de la cuillère en plastique et prends une bouchée. Lisa ne perd pas le Nord : « je vais vous commander un steak, comme celui du jeune homme qui me donne envie » annonce-t-elle à Luca. 
Il est quinze heures Madame, les cuisines sont fermées. »

Jeff lui propose d’aller manger dans un restaurant qu’il connaît dans le quartier, ce qu’elle accepte. Il paye, elle refuse, elle veut payer, il insiste, elle hausse le ton : « Jeff, stop it ! »

Elle demande à la maîtresse des lieux le livre d’or de Trump puis s’éloigne pour y écrire un mystérieux message. 

Elle revient et prend Jeff par le bras : « allons-y !
Qu’as-tu écrit dans le livre d’or ?
Un message personnellement adressé à Donald Trump.
M. Trump lit personnellement tous les messages qui y sont inscrits » précise Luca qui referme soigneusement le livre et le range aussitôt. 

Eu regard du grand sourire dessiné sur le visage de Luca, on pourrait très probablement penser que Lisa a pris le soin d’informer le Président Trump qu’il devrait adapter les horaires de son restaurant au rythme New-Yorkais.

Pas le temps de roter dans un moyen courrier

Quand c’est pas dans le lounge, Michel Roth invite aussi à sa table dans les airs à bord d’un Embraer 170. Le ticket d’entrée pour accéder à la cuisine de ce Chef français, Meilleur ouvrier de France et Bocuse d’Or, est au prix d’une carte d’embarquement en Business.

Au menu de ce repas presque gastronomique dans les airs : Crevettes snackées, sauce homardine à l’estragon, riz rouge, champignons et sarrasin grillé.

Pas évident de manger sur son plateau lorsque le voisin de devant a incliné son siège à fond. On se retrouve donc obligé de jouer les acrobates avec les couverts et forcément à en mettre même partout.

La tranche de Cantal AOP et de Saint-Nectaire n’auront pas fait long feu. Surtout avec ce pain cosmique, sorte de bloc sorti des fourneaux de l’espace qui ne donne absolument pas envie mais qui avec ce beurre doux reste passable.

On ne va pas se plaindre, c’est toujours mieux que le pseudo morceau de pain tartiné qu’on refuse volontiers mais qu’on prend quand même parce qu’on a faim.

« PNC niveau 100 », jargonne le pilote à la radio. L’avion entame sa descente, le plateau, lui aussi, suit la trajectoire et commence à pencher.

Les oreilles se bouchent, je n’ai pas encore entamé ce moelleux au chocolat. Je demande une coupe pour accompagner le dessert. L’hôtesse troque mon plateau contre un verre. J’avale en deux temps trois mouvements ce fondant qui n’a pas vraiment fondu.

Dix minutes plus tard, nous atterrissons. Pas même eu le temps d’un café ou d’un thé — ni même de roter. C’est le jeu du moyen courrier.

Allez, salut la compagnie !

Iberia ne baisse pas les bras

« Iberia, no me gusta ! » c’est ce que j’ai lancé à ce passager italien qui se lamentait de ne pas avoir plus d’information sur le retard ou l’éventuelle annulation du vol IB3406, Madrid – Orly. 

Notre vol semblait compromis depuis ce matin où un mail de la compagnie nationale espagnole nous informait d’un changement d’horaire sur le vol initialement prévu pour 14h. Certains confrères avaient déjà reçu leur carte d’embarquement pour le vol de 16h.

Le vol de 11h, annoncé porte M24 et 25, est affiché en retard sur les écrans mais toujours pas de porte affichée pour celui de 14h. Voyant tout le monde scotché devant les écrans, en attendant Godot, je décide quand même de me diriger vers la porte M24. Un pari risqué, car les portes M sont situées à l’autre extrémité de l’aéroport et pour y accéder, il faut prendre une navette. Allez, salut la compagnie !

Après un périple digne d’un parcours UTMB, à descendre des escalators, embarquer dans la navette, faire un trajet assez conséquent puis remonter des escaliers, j’arrive enfin devant la porte d’embarquement M24. Seul, devant le comptoir, le vol pour Orly de 11h y est bien affiché. 

Ce n’est qu’une vingtaine de minutes plus tard qu’une horde de voyageurs arrive. Ça y est, ça commence déjà à soupirer, d’autres à se prendre la tête. Puis, les fameux impatients aux cents pas, qui vont et viennent au comptoir. Arrive enfin une hôtesse d’escale, toute tranquille qui s’installe à son ordinateur feignant de ne pas entendre la rumeur qui gronde. 

Voyant tout le monde s’affairer avec leur carte d’embarquement, je décide de vérifier mon billet. Et là, c’est la panique… le numéro de vol de ma carte d’embarquement ne colle pas avec celui affiché sur l’écran. Je me connecte aussitôt sur le site Iberia, je procède au check-in avec le risque de voir ma carte précédente annulée et de voir un message qui me ferait perdre toute dignité, surtout que je suis le premier de la file pour embarquer.

Choix du vol, clic, clic… choix du siège, clac clac… tiens donc,  je viens de passer du siège 15F au siège 15J. Je lève les yeux et me rends compte de la présence d’un Airbus A350-900 en bout de la passerelle aéroportuaire. Iberia aurait-il affrété ce bel oiseau flambant neuf pour rattraper le retard des deux vols ? Un collègue trouve l’entreprise trop ambitieuse pour un moyen courrier. Bingo, mon intuition était la bonne. 

Nostalgie à bord d’un Airbus A350

C’est ainsi que j’ai pu embarquer pour la première fois à bord d’un Airbus A350, un imposant coucou qui trône juste en face de son grand frère le regretté Airbus A380-800, toujours opérationnel chez Emirates — mais qu’Air France s’est empressé de se débarrasser après la pandémie. Même s’il n’a qu’un seul étage, l’A350 a un gabarit assez conséquent et on le ressent rien qu’à l’embarquement. 

À bord, je me retrouve en classe Premium economy, avec des sièges relativement confortables, des vrais casques audio englobants les oreilles pour réduire le bruit en cabine mais surtout la possibilité de relever les jambes comme le fauteuil de Joey et Chandler dans Friends

En parlant de Friends, l’écran en face à moi propose un catalogue de films et de séries télé à faire pâlir n’importe quelle plateforme. En effet, parmi la pléthore de sitcoms, les 10 saisons de Friends y sont proposées, également la saison 1 de The Golden Girls. Nous sommes bien en 2024, vous ne rêvez pas ! Et pour cause, le reboot de Full House, plus connu sous le nom de la Fête à la maison, Fuller House, y est proposé ou encore le sequel de la cultissime série Will & Grace, une suite, onze ans après, avec les même acteurs. 

Voilà de quoi ravir certains spécialistes sérivores. Seul souci, le vol ne dure pas longtemps, les instructions de sécurité et les interminables annonces inutiles puis tout le blabla — en espagnol et en anglais — du pilote s’excusant pour le retard ont pour effet de mettre en pause la diffusion. Or, le petit carré en bas de l’écran m’indique qu’il ne reste 1h18 avant l’atterrissage. Il va falloir être précis dans son choix de programmation. Challenge accepté, c’est parti pour le marathon de sitcoms. 

Daniel Latif

Demi Sky Priority

C’est une nouvelle mode dans certains aéroports tels que Nice, Marseille, Copenhague, Istanbul, Barcelone, Hanover, Milan, entre autres… que de vous frustrer lors d’un voyage à deux. En effet, si votre billet vous permet de passer en Sky Priority et que vous voyagez avec votre ami, compagne, collègue ; ce dernier sera systématiquement refoulé du « fast track ». Lumière rouge à Barcelone pour mon photographe qui m’accompagne sur un reportage : « Monsieur est avec moi…
– Non, il ne peut pas vous accompagner
– Si, il est avec moi, nous voyageons sur le même vol »

La dame tient absolument à jouer les chefaillons : « vous : oui ; lui, non »

Un policier passe à cet instant, voyant que la situation est toujours bloquée. Il inspecte mon billet et ne comprend pas non plus pourquoi madame ne veut pas me laisser passer avec mon accompagnant. N’osant pas contrarier sa collègue, il hausse les épaules et s’excuse de ne pouvoir rien faire dans cette situation. 

Ce cas n’a plus rien de trivial et se produit souvent dans de nombreux aéroports, où l’on pourrait penser que chaque passage est facturé et retenu sur les salaires de ces sheriffs d’aéroport. Pourtant, il ne s’agit qu’un peu de bon sens et d’un minimum d’intelligence. 

Du côté d’Air France, on nous confirme bien que « ce manquement n’est conforme aux engagements Sky Priority envers les clients et afin d’éviter qu’une telle situation ne se reproduise » cette énième mésaventure « a été prise en compte dans l’amélioration de notre service »

Voilà, comment un voyage peut rapidement mal tourner parce que votre compagne ou ami vous lance, avec un regard des plus culpabilisateurs : « donc, tu vas me laisser seul pour prendre les contrôles normaux ? »

Décision crève-cœur, qui semble être des plus égoïstes, certes, mais mieux vaut un demi Sky Priority, que plus de Sky Priority

Allez, salut la Compagnie !

Daniel Latif

Carte postale d’été

À l’heure où plus personne ne prend la délicatesse de s’écrire, à l’heure où les correspondances postales riment avec un autre temps que les moins de vingt ans ne peuvent connaître…

Voici, encore mieux qu’une carte postale, une parenthèse où se conjuguent les sons, les images mêlés à un doux parfum d’été. Au-delà de la performance théâtrale, cette synesthésie des plus intimistes s’intitule « J’avoue » et a réuni, autour de Daniel Latif, un cœur des plus prometteurs, le groupe Confessions. Avec au chant : Selen Karlikaya, Georgie Brown, Zara Asatrian, au piano Jazz Cuti, à la basse Adrien Legleye et Tudi Cariou à la batterie en direct de la plage de Saint-Nazaire.

Laissez-vous embarquer par cette vue imprenable sur l’océan atlantique, une caresse estivale, un rêve à observer et une douceur pour les oreilles orchestré par La Voix et Craig.

Une production Wolface pour Fréquence 3

Salon SNCF Grand voyageur Paris Gare de Lyon : le haut lieu de revendication

Il y a deux catégories de voyageurs : le petit voyageur et le Grand voyageur. Et notre Grand voyageur ne voyage pas pour le plaisir, il fait du Business. À défaut de la carte de fidélité Grand voyageur, c’est la mention que vous devez avoir sur votre billet si vous voulez accéder au Salon grand voyageur TGV Inoui de Paris gare de Lyon. En effet, à la SNCF la Business est plus prestigieuse que la 1ère classe.

Dans la plupart des lounges, il faut grimper au deuxième étage pour trouver un peu de calme. Là, vu le peu de place au rez-de-chaussée, il n’y a pas le choix : il faut monter les escaliers ou prendre l’ascenseur.

À l’étage, le salon vous offre son plus beau panorama sur les panneaux publicitaires Lacoste parfaitement disposés pour vous gâcher la vue et cette immense bâche Longines avec Jennifer Lawrence qui nargue le voyageur — qui va se sustenter à la Brioche Dorée — avec sa montre Longines DolceVita au poignet, légendé et signé par l’émouvant épigraphe : « l’élégance est une attitude ».

Ces boissons sont préparées gratuitement et servies à volonté par la machine Selecta. Oui, oui, vous avez bien lu gratuitement et Selecta dans la même phrase.

Comme celle du Salon de la Gare Montparnasse, le choix y est impressionnant. Ainsi, trois machines réparties dans le salon vous proposent du café en grains Bio et Fair Trade avec une déclinaison improbable autour du café : ristretto, expresso, expresso crème, expresso allongé, double expresso, café ou café américain.

Ceux qui n’aiment pas le café mais qui ont besoin d’une dose de caféine seront également servis avec une déclinaison de cafés gourmands : cappuccino, mocca, café latte, latte macchiato. Enfin, les enfants seront tout émoustillés de découvrir les déclinaisons de duo chocolat, chocolat viennois, chocolat chaud et chocolat blanc. 
Un tel large choix qui n’a rien à envier au plus sophistiqué des distributeurs de boissons chaudes que vous avez pu connaître dans vos années fac. 

Les amateurs de thé ne seront pas laissés pour compte avec un choix des plus alléchants de thés Clipper dont un sachet à la menthe et citron spécialement conçu pour les infusions à froid.

Je vous ai mis la liste exhaustive pour que vous puissiez rapidement faire votre choix. Car ici aussi, il faudra faire la queue et vous n’aurez que peu de temps afin de réussir à vous décider parmi la pléthore de boissons proposées. Et vous le savez bien, le voyageur en train est pressé. Alors imaginez, à quel point le Grand voyageur peut s’impatienter. D’ailleurs, celui derrière-moi s’en agace tellement qu’il me colle de plus en plus.

Ici, vous êtes un peu comme chez Ikea. Vous parcourez des allées de parquet et observez les différents espaces, la variété des canapés, il y a des sièges de taille super size, plus ou moins hauts. Là-bas, des beaux sièges façon Thalys en 1ère agencés en compartiments de train. Une belle illusion qui vous préparera sans doute psychologiquement pour votre voyage.

Un intrigant panneau indique que le salon dispose d’une bibliothèque. Je cherche, en vain. Aucun livre présent sur cette étagère traversante. Une belle diversité de plantes et quelques jeu de société dont un jeu à damier, un Digit — où il faut trouver le bon mouvement. Le Cogitus, le solitaire des jeux de stratégie, n’a pas trouvé preneur, et ce Pontu, avec écrit en gros dessus « fabrication française, artisanale et éco responsable » n’a connu guère de succès, non plus.

« Tac tac tac tac… Aaaahhhhhhhh ! » se soulage un passager qui conclut : « oh ! Ça fait du bien, ça faisait longtemps… Est-ce que je vous dois quelque chose ?
Pas du tout Monsieur, c’est un service que l’on propose au salon ».

Pas de bibliothèque, mais un coin massage où les femmes et hommes d’affaires peuvent venir se détendre avec la vue sur le Hall 1 et ses interminables va-et-vient. 

Au détour des pseudos demi-alcôves qui peinent à masquer les commérages. On peut participer à la conversation de Micheline et Giselle. Ces jeunes demoiselles se sont installées  sur le canapé du milieu, buvant leur café comme si c’était du Calva, elles ricanent à gorges déployées puis entre deux messages envoyés sur WhatsApp et un défilement frénétique de leurs réseaux sociaux ponctuent leurs conversations de « putain », « grave », « j’avoue » et de « ah ouais !? » à tout va. 

Le Monsieur Business sur son ordinateur portable ne tient plus, il décide de changer de place.

En dépit du confort et du standing des vastes fauteuils et de la variété des espaces à vivre, l’envie de m’asseoir n’est pas présente. On regrette définitivement les roulés à la cannelle ou les hot dogs. Car, c’est ce qui manque cruellement à ce salon : de quoi manger ! Et quand on a rien à manger et qu’on a que de la presse à se mettre sous la dent : gare à la rage de dent !

La presse disposée sur des comptoirs est déjà à moitié envolée. Dieu soit loué, les journaux sont sous baguette en bois, personne n’ose encore les décrocher pour les emporter. Deux magazines se battent en duel. Je ne parle pas des catalogues publicitaires Wallpaper * ou de Culture Golf Fairways que personne n’a embarqué, soit en raison de leur poids, soit parce qu’ils sont en anglais…

Il reste deux magazines : Challenges avec sa Une « qui va succéder à Macron ? » et Marianne « ceux qui ont fait dérailler la SNCF ».  Les responsables de ce lounge doivent être sacrément politisés ou avoir une bonne tranche d’auto dérision. 

Un panneau indique « plus de 100 titres de presse en un clic » grâce à une application à télécharger.
Une dame en train de signer le livre d’or : « Sans la presse quotidienne, le salon perd tout son intérêt. Triste. »

Un passager curieux qui lisait le message sur son épaule lui répond aussitôt : « Ils ont voulu la jouer écolo, mais ça marche pas. La presse sur le téléphone s’affiche mal, ça pixelise et c’est mal scanné, on n’arrive pas à lire pas les coins ».

Amusé par ce recueil, je commence à le parcourir. Ce livre, comme son nom l’indique, est une vraie mine d’or. Il se lit en discontinu et affiche clairement ce que pensent les Grands voyageurs, leur philosophie et leurs opinions politiques.

En voici un florilège :

« À bas les VIP, nous sommes tous humains » Anonyme

« Rien n’est trop beau pour la classe ouvrière » Anonyme

«Top d’avoir prévu des espaces pour changer les bébés aussi dans les toilettes homme !» écrit un autre anonyme.

« Il était une fois un salon grand voyageur agréable, où l’on pouvait lire la presse, boire un coca, une eau gazeuse, un café ou même une bière, feuilleter un magazine. Tout cela est bien loin ! On a l’impression d’être dans une étable, où les vaches, au lieu de ruminer, consultent leurs e-mails. Quelle déchéance ! Je préfère aller au café. Salut ! » s’insurge Jojo le 15/09/23

« Impossible d’accéder à la presse numérique pour les billets 1ere pro ? » 

« La suppression des journaux est fort regrettable. Cette décision unilatérale sans information est un très mauvais signal aux grand voyageurs » écrit Pierre, qui a eu un droit de réponse en dessous : 

« et l’écologie monsieur ? » suivi d’un tampon Salon grand voyageur TGV Inoui Paris Gare de Lyon du 1er septembre 2023.

Ce qui a agacé « CC » qui a lui aussi exercé son droit de réponse sur une page entière : « Où sont passés les journaux, les revues que nous lisions avec délice dans le salon grand voyageur. Même la lecture des journaux sur place n’est plus possible ?

Non, lire la presse sur Internet n’est pas écologique !!! Les outils numériques dévorent l’énergie. Lire sur des petits écrans fusille les yeux, la vision. Et la matérialité du papier, sa sensualité, qu’en faites-vous ? SVP. Remettez les journaux ».

« Merci d’avoir remis les journaux » signe Jph quelques pages plus loin.

Après avoir parcouru autant de petite littérature de gare aux relents plus ou moins propagandiste, à travers certains mots, j’ai préféré prendre le magazine Wallpaper * et quitter le lounge.

Allez, salut la compagnie !

Daniel Latif
Photos : DL /DR

Voyage dans le temps à bord d’un train spécial

Paris, Gare du Nord, 9h10. Le panneau de départ des grandes lignes indique un « TRAIN SPÉCIAL » association MFPN, à l’heure à la voie 18. 

Il s’agit d’un train touristique affrété par l’association Matériel ferroviaire patrimoine national. Ce matin, c’est Mateo Derosais, habituellement conducteur de train à Paris Saint-Lazare, qui prend les commandes d’une locomotive à la disposition singulière. Il s’agit d’une locomotive diesel, monocabine qui a passé sa carrière à faire du transport de marchandise. Un petit détail attire l’œil du connaisseur : la mention « Dijon – Périgny », son technicentre d’attache, où elle était régulièrement entretenue. 

Cette locomotive immatriculée BB69432 va tracter des voitures inox des années 60 et voiture vertes, type OCEM, des années 30, embarquant 366 passagers : direction Le Tréport. 

Stéphanie, une vacancière ou « touriste du samedi » comme elle aime se présenter, adore embarquer en train car « le train, c’est le voyage ». Et celui-là, ce n’est pas n’importe quel train car ici « pas de QR code à scanner pour ouvrir les affreux portiques. Et en plus, personne ne râle ! » observe-t-elle. Un train où tout le monde est tout sourire, on comprend pourquoi il porte la mention de « train spécial ». 

Son programme, comme pour d’autres n’est pas encore établi. Il s’agit avant tout d’aller au Tréport, ville qu’elle n’a encore jamais visitée. 

A bord des voitures Inox datant des années 70, c’est un voyage dans le temps et un dépaysement complet. Les sièges ont le standing et le confort d’une banquette, les fenêtres s’ouvrent grand et il y a même un contrôleur en uniforme d’antan et montre à gousset. 

A bord de la cabine, le conducteur est assis en position arrière, derrière le long museau de la locomotive. Mateo se réjouit de piloter « un train vivant, qui fait du bruit. Plus contraignant à conduire, car il y a plusieurs choses à surveiller et il faut être à l’écoute de la machine ». 

Surveillant les arrières du convoi, pour vérifier que tout se passe bien, il suit scrupuleusement son plan de route sur son iPad avec les conseils bienveillants de Didier Hanot, ancien conducteur, qui officie comme copilote. Nostalgique, il a même ramené son fascicule horaire de 2005 : « À l’époque, on n’avait pas de tablette, on dessinait notre étude de ligne et toutes ses spécificités »

Le paysage se profile le long des rails, l’on s’échappe de Paris et les stations défilent. On réussit à lire furtivement le nom de l’arrêt : Stade de France. 

« On est à l’heure ? » demande Mateo à Jean-Emmanuel, cadre transport chez SNCF qui lui rétorque : « Oui, on a même de l’avance ! », tout en scrutant sa tablette. 

Les différentes topographies évoluent et se dessinent pendant notre trajet. Les passages à niveau s’enchaînent. Quelques voitures nous gratifient de klaxons en guise de salutation. Des passionnés attendent le long des quais, téléphone en main pour immortaliser notre passage. Des enfants hypnotisés par notre train à l’approche d’un pont commencent à agiter les bras. Le conducteur les salue en sifflant : « TCHIIII TCHHOUUU ! », les voilà aussitôt transportés. 

Nous traversons Beauvais. On reconnaît d’ailleurs cette odeur âcre, caractéristique émanant de l’usine Spontex. 

La voie devient unique, le ballast s’efface peu à peu au profit d’une végétation. Il paraît que la SNCF n’a plus le droit d’enlever ces pans de verdure, au détriment de la sécurité et de la circulation des trains. 

La vue sur l’horizon est dégagée de tout poteau électrique, les chemins de vers serpentent. L’occasion d’admirer les voitures à l’arrière qui épousent la courbe dont cette intrigante voiture postale qui « était accrochée aux trains de voyageurs et servait au tri postal « ambulant » à bord des trains. Pendant les arrêts, les agents de la Poste (PTT) chargeaient et livraient des sacs de courrier et les triaient en roulant » explique Florian, passionné de train et bénévole à l’association MFPN. 

Il y a de surcroît cette voiture verte, bien antérieure à la SNCF, datant de 1930, autrefois nommée la PLM, Paris Lyon Méditerranée. 

12h10. Notre train arrive en gare du Tréport avec un incroyable comité d’accueil en tête de quai. Agents SNCF, chef de gare, voyageurs ou simples curieux nous accueillent tels des passagers venant d’un périple d’un autre siècle. 

Parmi les passagers, nombreux viennent souffler des félicitations aux conducteurs, leur transmettre leur bonheur vécu lors du trajet. Une dame accourt et s’exclame : « il est beau votre train, je peux regarder à l’intérieur ? Je me souviens très bien, pour embarquer c’était pas facile », commente-t-elle sous les yeux ébahis de son mari. Quelques instant plus tard, elle apparait à la fenêtre, s’adressant à son époux : « c’est chouette ! Oh, c’est marrant de retrouver ça… » puis se tournant vers les bénévoles de l’association MFPN, « vous devez être fiers, quand même !? ». Les passionnés, qui ont œuvré depuis des mois avec tout leur cœur, peinent à dissimuler leur joie devant un tel enthousiasme. 

Six heures d’arrêt pendant lesquels les 366 passagers vont pouvoir profiter de la mer. Pendant ce temps, les bénévoles s’affairent à ravitailler la voiture bar restauration, à nettoyer les wagons, les fenêtres, de fond en comble pour que le train soit pimpant pour le retour. Ensuite, il faudra manœuvrer la loco pour la placer en queue de train et repartir à Paris. 

18h40. Notre train repart direction Paris Gare du Nord. Nous retrouvons Stéphanie, qui a eu le temps de visiter Le Tréport et de se balader à Mers. « J’ai assisté à un mariage, je suis allé voir la Vierge et j’ai aperçu une soucoupe volante » affirme-t-elle tout en montrant des clichés sur son téléphone. 

Une escapade des plus improbables et une expérience des plus fluides pour cette voyageuse qui apprécie de pouvoir être « assise à la même place qu’à l’aller » . Ce qui lui permet de remarquer que ses voisins sont nettement plus zen. 

Le prochain train affrété par l’association MFPN partira le 16 décembre, le train spécial Père Noël Express en direction d’Amiens.

Daniel Latif
Photos : DL /DR